revue de presse

Presse nationale

"Quoi de plus réjouissant qu’un cinéma qui expérimente ?
Le film que vient de réaliser Lucile Chaufour, l’Amertume du chocolat, appartient sans contexte, au territoire de l’expérience. A la fois fragmentaire et plein, il observe avec acuité le quotidien d’une femme qui vit en banlieue avec ses deux enfants. Comme le dit laconiquement et sans verbe le résumé officiel : « une jeune mère, deux enfants, moments d’une journée en banlieue parisienne ». Si ces mots sont retranscrits ici, c’est pour faire sentir à la fois la simplicité du dispositif de départ mais aussi le fait que l’Amertume du chocolat va bien au-delà de la simple chronique sociale ; le film est à la fois un tableau poético-réaliste à la Philippe Garrel et un thriller en appartement. Mais la notion de genre ne s’y égare que pour mieux s’épanouir en se diffractant.

En effet, la mère, aux prises, avec la vie matérielle, est également sous l’emprise d’une instabilité référentielle et semble un étrange mélange entre la « Jeanne Dielman » de Chantal Akerman, une héroïne « sirkienne » flamboyante, voire la Fanny Ardant de La Femme d’à côté de François Truffaut. Un climat d’inquiétude pour l’œil s’installe alors, annoncé déjà d’une certaine façon au générique où l’on peut voir des images en surimpression de la mère et des deux enfants, prises à différents moments du film à venir, comme si ces éléments isolés se décollaient de la réalité, et se présentaient éparses, tels des symptômes mystérieux d’une catastrophe anticipée.

Cette sensation de trouble quant à ce qu’on voit est par ailleurs accentuée par un montage, non pas discontinu, mais qui isole et théâtralise à la façon d’un film noir, certains gestes, et certaines situations. Rien n’est jamais donné comme évident et chaque instant semble une découverte, un dévoilement du caché que renforce une bande-son postsynchronisée qui agit d’autant plus qu’elle peut passer alternativement de l’avant à l’arrière-plan.

L’Amertume du chocolat est un film qui se trouve sans cesse au bord de l’inondation, effective et abstraite, et qui maîtrise d’une manière perverse l’accident, au sens où l’attente du spectateur est sans cesse déjouée et ajournée face à cette mère, entièrement dans l’affect, et à deux doigts de la crise de nerfs, figure d’amour et de désordre, dans un déni constant d’elle-même. Personnage héroïque également qui dynamite le rôle qu’elle est censée jouer, en étant tout à la fois mère, amante, ou dangereuse pietà. Renforçant l’effet d’inquiétante étrangeté, les paroles prononcées paraissent venir de loin, à l’image du noir et blanc granuleux de la photographie. Ce sont des mots à peine dialogués, parfois inaudibles et qui ressemblent plutôt à ceux d’un monologue hyperréaliste. Ils participent au sentiment d’un film qui se recroqueville sur lui-même et qui ausculte un épisode violemment dépressif, clos par l’espace domestique. L’Amertume du chocolat, par la précision d’un montage incisif et l’ouverture maximale aux interprétations (avons-nous bien vu ce que nous avons vu ?), laisse en bouche un goût persistant."

François Bonenfant
Bref, le magazine du court-métrage N°85 - nov-déc 2008


Presse internationale

"A film full of cinema, between Chantal Akerman and Godard, in a astonishing black and white, brings out, with brightness and intelligence, the theme of the difficulties women have to keep together the roles of mother and what the external world asks them. Water comes out from the pipes, uncontrolled, like the desperation of the protagonist: a fugue of liquid and hopes in the uncertainty of what could happen, in a word where the dialogues are monologues, and there's no hope to be understood."



"Un film pieno di cinema, tra Chantal Akerman e Godard, L’amertume du chocolat, dallo splendido bianco e nero, racconta per piccoli cenni e intelligente leggerezza la difficoltà, comune a molte donne, di adeguare la propria immagine di madri alle richieste, spesso perbeniste, del mondo esterno. L’acqua sgorga dalle tubature, incontrollata, come la disperazione della donna protagonista : una fuga di liquidi e speranze sospese nell’incertezza di quello che potrebbe accadere, in un mondo in cui i dialoghi scorrono come monologhi, senza alcun possibilità di essere capiti."
Luca Malavasi and Pier Maria Bocchi - writers in the Italian revue of cinema Cineforum and professors of Cinema at Milano Universitity IULM - 2009